De prof de yoga au Club Med à la radio la plus écoutée de France, il y a eu quelques petits pas, certains tout droit et d’autres de côté… Cette année, Daniel Morin célèbre ses 20 ans sur France Inter, signe pour une nouvelle saison comme maître de cérémonie de la tournée des jeunes humoristes de la station et, pour la première fois, monte sur scène en solitaire avec Ta gueule, Esteban.
«J’ai démarré par un reportage à propos de l’éboulement d’une falaise sur la plage de la Petite Chambre d’amour au Pays basque. Première fois que je me servais d’un Nagra, le magnéto avec lequel on enregistrait, qui pesait un âne mort. Je me suis dit : “C’est sympa, je vais continuer.” J’étais persuadé que, pour travailler à la radio, il fallait avoir fait de hautes études spéciali-sées. Je ne savais pas à l’époque qu’on pouvait avoir une carte de presse sur la bonne foi de son patron.» Sur Ouï FM, engagé à la rédaction, il devient le binôme du journaliste qui assurait les flashs du 6 h-9 h et du 17 h-20 h. «J’ai rencontré Frédéric Martin, que j’ai rejoint pour une heure d’humour le soir à 23 heures. J’ai dû lâcher l’info, je n’étais plus crédible…
Dans l’émission qu’il a animée ensuite, “Le Monde de monsieur Fred”, j’ai mieux compris ce que j’aimais vraiment faire.» Il rejoint France Inter, en décembre 2005, pour «Le Fou du roi», l’émission d’info et d’humour animée par Stéphane Bern. «Quand il est parti à RTL, je devais le suivre. Mais je n’ai pas eu envie de quitter France inter.» Pourquoi ? «La liberté. Jamais aucun de mes papiers n’a été relu. Pas d’annonceur, pas de tunnel de pubs. Un esprit…» Isabelle Giordano reprend le créneau de Stéphane Bern pour une émission qui devait être 100 % féminine. Elle aime pourtant l’idée d’intégrer Daniel Morin. «France Inter est devenue ma maison. Il y a eu ensuite Frédéric Lopez, et puis Nagui… jusqu’à aujourd’hui.»
Depuis quatre ans, c’est lui qui emmène les jeunes humoristes de la station en tournée : «J’aime bien ce rôle de maître de cérémonie. Au début, je me suis contenté de les annoncer. Le producteur, Christophe Meilland, m’a proposé de rester une peu plus longtemps sur scène entre chaque intervention. Jusqu’au jour où il m’a demandé quand j’allais faire mon propre spectacle. Ça a un petit côté proxénète, un producteur… J’ai d’abord refusé. Il a insisté, et il m’a mis un doute : “Peut-être qu’un jour tu le regretteras ?” Il n’avait pas tort. J’ai dit d’accord !» C’était il y a six mois, et Daniel Morin n’avait rien : «Pas un mot, pas une idée. Je savais seulement que je voulais éviter l’humour facile, blessant, stigmatisant.»
«Pas un mot, pas une idée. Je savais seulement que je voulais éviter l’humour facile, blessant, stigmatisant.»
Il décide de tirer un fil rouge, lui-même, ou plutôt le personnage un peu caricatural de ses chroniques quotidiennes : un homme de son âge, la cinquantaine, qui tente de se déconstruire et réagit à tous les sujets à l’ordre du jour : «Le genre, l’écologie, le climat, les injonctions du moment… Ce sont des questions intéressantes. Plus j’y travaille, plus j’approfondis, et plus je me laisse convaincre. Ça me transforme un peu. Bon, pas sur tout : ma fille de 11 ans m’a balancé récemment, en racontant à tout le monde que “(son) père (était) un pollueur qui jette ses clopes dans le caniveau”…» C’est pour sa fille qu’il entend bien aménager sa tournée en fonction des jours où elle est chez lui : «Je l’ai du jeudi au dimanche… je ne vais tout de même pas lui faire manquer l’école sous prétexte que son père est humoriste !» En avril, les premiers rodages de son seul-en scène, Ta gueule, Esteban, ont eu lieu au Point Virgule : «C’est vraiment grisant, les rires de toute une salle. A la radio, on a un million d’auditeurs, mais on ne les voit pas. Sur scène, ils sont beaucoup moins, mais ils sont là.» Il reprend le 13 septembre, une fois tous les quinze jours jusqu’à Noël. Après, c’est le grand départ. Son nouveau départ.
Propos recueillis par Ellen Willer
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