En février 2018, la France découvre un jeune violoncelliste inconnu du grand public lors de la soirée des Victoires de la musique classique. Gagnant dans la catégorie soliste instrumental, Victor Julien-Laferrière passe devant Gautier Capuçon et se hisse au rang des artistes les plus prisés de la scène musicale. C’est pourtant vers la direction d’orchestre qu’il s’achemine en créant l’ensemble Consuelo, hommage à une figure de l’histoire et de la musique : George Sand.
Vous vous êtes tourné vers la direction… par perte d’intérêt pour le violoncelle ?
Non, le violoncelle, c’est passionnant ! Mais ma première passion, la direction d’orchestre, préexistait dans mon esprit. Enfant, puis préadolescent, je me faufilais dans les passages secrets de l’Opéra de Paris pour écouter les répétitions de l’orchestre lorsque mon père jouait. C’est plutôt un retour naturel vers mon premier amour.
Que vous apporte votre âme de violoncelliste dans votre travail de chef d’orchestre ?
Je me sers de toute mon expérience musicale lorsque je dirige. Mon ADN est celui d’un chambriste. L’idéal de l’orchestre, c’est de faire de la musique de chambre. Lorsque cette alchimie fonctionne, cela crée un lien très fort entre les musiciens. En plus de vingt ans à jouer avec des partenaires différents, j’ai appris à comprendre les musiciens et leurs réactions.
Un répertoire que vous préférez diriger ?
J’éprouve un plaisir immense à passer d’un répertoire à un autre. Bruckner me fascine, et j’ai redécouvert récemment quelques perles chez Tchaïkovsky, dont La Tempête et ses suites d’orchestre.
Un qui vous fait peur ?
Tous ! Tous me font peur. (Rires.)
En 2017, vous remportez le premier prix du concours Reine Elisabeth de Belgique, lors de la première édition consacrée au violoncelle. Aviez-vous prémédité un tel engouement pour cet instrument ?
Je m’étais présenté pour faire reconnaître mon travail, alors c’était peut-être prémédité en cela. C’est un concours qui est né dans les années 1930 et perdure depuis. Il fait partie des plus prestigieux du monde. Il y a une réelle effervescence autour, des étudiants et des gens de tous horizons se réunissent autour de la musique. On n’a pas d’équivalent en France, et c’est bien dommage.
Votre salle préférée ?
Les grandes salles parisiennes de concert sont assez récentes. Il ne faut pas oublier qu’avant les orchestres se produisaient au Théâtre Mogador, pas idéal pour accueillir un grand orchestre, ou dans les salles Pleyel, Cortot, Gaveau. J’ai beaucoup d’affection pour le Théâtre des Champs-Elysées. Quand je dirige, je ne vois pas le public, mais je le sens très proche de moi, particulièrement dans cette salle. L’acoustique n’est pas parfaite, contrairement à celle de l’auditorium de Radio France, mais, en plus de rayonner par sa beauté, c’est un endroit qui a vu Consuelo grandir.
Où peut-on vous rencontrer quand vous avez du temps libre ?
Si vous allez du côté de Roland-Garros, vous ne pourrez pas me rater ! Je suis fan de tennis. Sinon, à la Cartoucherie de Vincennes, qui propose plein de pièces de théâtre. Située dans une ancienne fabrique d’armement et de munitions, cette scène a une identité que je trouve unique. Et, dès que je le peux, je m’enfuis en Bourgogne !
Propos recueillis par Marie Jérémie
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