Le flou est un voyage. Mieux que le net, il peut raconter des histoires, évoquer des souvenirs, provoquer des émotions.
Le flou prend de la distance, il s’éloigne du réel pour en proposer une version poétisée. Le flou, par définition, n’est pas objectif… il est subjectif. Malgré les apparences, le flou ne soustrait rien, il ajoute. Il n’escamote que le superflu, n’éclipse que l’inutile, il va à l’essentiel, c’est-à-dire à l’émotion. Depuis quelques années, le travail photographique de François Fontaine est devenu flou. Sa vision s’est décalée. Lassé peut-être de saisir le réel, il préfère désormais créer des images fugaces, vaporeuses, poudrées, picturales, mystérieuses. Des images qui ne viennent pas du monde, mais de l’intérieur. En prise directe avec son inconscient. Il y a dans ses photographies vibrantes une retenue, une pudeur, une nostalgie, une recherche de douceur, une grâce, même lorsque pointe un souffle d’inquiétude. Ne vous y trompez pas, l’esthétique du flou n’est pas une coquetterie, mais une démarche : en escamotant les duretés du réel, le flou évoque la possibi-lité d’un monde meilleur. Le flou prend du recul par rapport à la laideur du monde. L’esthétique du flou a à voir avec la délicatesse. Et si le flou pouvait réenchanter le monde ?
Séraphin Bonnot
François Fontaine est lauréat du prix Leica des Nouvelles Ecritures de la photographie environnementale 2025.
©Série Silenzio François Fontaine /Agence VU’ Série «Eden» (Japon)
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