Après avoir fait ses armes dans l’univers de la mode, Cécilia Mergui a choisi de redonner vie en 2021 à la marque Bienaimé, une icône des années 1930. Avec audace et sensibilité, elle réinvente l’univers du parfum et du soin, alliant charme intemporel et vision contemporaine de la beauté. Rencontre entre héritage et modernité.
Comment est venue l’idée de faire revivre Bienaimé ?
Passionnée depuis toujours par l’Art déco, je chine régulière-ment dans les brocantes, marchés aux puces et ventes en ligne. Je suis fascinée par les objets raffinés des années 1930 tels que flacons de parfum élégants, poudriers délicats et accessoires de beauté ingénieux. Ces objets racontent une époque où la beauté était perçue comme un art de vivre. En comparant avec les produits d’aujourd’hui, je trouvais qu’on avait perdu cette richesse esthétique et ce sens du détail. En cherchant sur un site de brocante, j’ai découvert un magnifique poudrier signé “Bienaimé”. Mes recherches m’ont révélé qu’il s’agissait d’une maison fondée par Robert Bienaimé, parfumeur emblématique des années 1930. J’ai été fas-cinée par son histoire et par la qualité des créations. J’ai commencé à imaginer la renaissance de cette marque.
De nombreuses marques historiques sont relancées, mais peu avec un souci aussi prononcé de fidélité à leur héritage. Comment avez-vous trouvé l’équilibre entre tradition et modernité ?
C’est un équilibre complexe que je réévalue constamment. Ma démarche est de me demander ce que serait devenue la marque si elle avait perduré. Nous avons puisé dans les archives de la maison pour créer un univers visuel à l’élégance intemporelle, tout en adaptant les formulations aux exigences actuelles. Nous avons conservé l’idée du luxe durable. A l’époque, les objets de beauté étaient faits pour durer et être rechargés. J’ai voulu retrouver cette logique avec des flacons rechargeables et des matériaux nobles. Tous nos produits sont, qui plus est, fabriqués en France, avec, pour volonté, de défendre le savoir-faire français en parfumerie.
Y a-t-il un parfum qui représente particulièrement l’esprit de Bienaimé ?
Vermeil, sans hésiter. C’est le premier parfum que nous avons retravaillé, inspiré des formules historiques de la maison. Un parfum poudré, qui évoque la nos-talgie des objets de beauté anciens. Enfant, j’étais fascinée par l’odeur de maquillage émanant des tiroirs de la salle de bain de ma grand-mère. Cela représentait pour moi une promesse de féminité, un idéal auquel j’aspirais. Nombreux sont nos clients à être émus en le sentant, parfois jusqu’à en avoir les larmes aux yeux : la preuve du pouvoir des odeurs sur la mémoire.
«Nombreux sont nos clients à être émus en le sentant, parfois jusqu’à en avoir les larmes aux yeux : la preuve du pouvoir des odeurs sur la mémoire»
La beauté serait donc affaire d’émotion et de transmission…
Exactement. Ce qui m’intéresse, c’est cet attachement, ce lien intergénérationnel fort lié à la beauté féminine. Je souhaite offrir une expérience sensorielle qui suscite l’émotion et recréer des objets qui traversent le temps. Ma plus belle réussite serait que, dans cinquante ans, nos flacons se transmettent de nouveau de mère en fille. Je suis convaincue que cette dimension émotionnelle, rare et désirable, rend une marque unique et atemporelle.
Votre dernier parfum, Monsieur, incarne, dites-vous, “une certaine idée du chic parisien”…
Monsieur est notre première création inédite, inspirée de l’élégance discrète des hommes parisiens, en hommage à Robert Bienaimé. C’est une verveine citron boisée, fraîche et raffinée, pensée pour ceux qui veulent sentir bon sans en faire trop. Il reflète cet art du chic naturel, où l’effort ne doit pas se voir, ce qui est, pour moi, l’essence même de l’élégance parisienne.
Bienaimé Paris. 30 rue Saint-Roch, Paris Ier.
Manon Demurger
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